Gilles Jonemann fait partie de ces figures historiques de la bijouterie contemporaine française qui ont su montrer la voie à plusieurs générations de créateurs.

Dans les années 70, il impulse, avec quelques autres, une nouvelle voie pour la joaillerie en prônant l’utilisation de matériaux non précieux mais dont les caractéristiques particulières pouvaient apporter un renouveau des formes attendues du bijou.

Fortement influencé par les nombreux voyages qu’il effectue aux quatre coins du monde, il en rapporte à chaque fois les matériaux insolites de ses futures parures. Calebasses du Sénégal, graines de Madagascar, écailles de poissons, coquillages des îles, sont transformés par le savoir-faire unique de l’artiste. Mais l’exotisme n’existe pas uniquement à l’autre bout du monde et c’est naturellement qu’il ramasse les galets de Porquerolles ou ceux d’Antibes avec lesquels il expérimente des techniques de sertissage innovantes.

Son travail à partir des matériaux naturels bruts et notamment des pierres est autant marqué par le détournement des codes de la joaillerie qu’une réappropriation d’une culture du bijou ethnique. Par l’utilisation de ces éléments prélevés dans la nature, il s’inscrit dans la grande lignée des bijoutiers « primitifs » qui devaient eux aussi transformer à leur manière les éléments les plus rudimentaires en joyaux. C’est d’ailleurs parfois dans des pierres plusieurs fois millénaires, qu’il choisit de sculpter ses bijoux.

Il y a dans le travail de Gilles Jonemann une manière de rendre compte de la beauté du monde avec une grande simplicité. Un monde fait de croisements et de rencontres autorisant l’association d’un composant ancestral à un composant contemporain dans une nouvelle histoire du temps.

Christian Alandete